Les consommateurs vont présider aux marchés dynamiques
sur March 20, 2025En 2025, où se tournent les établissements financiers occidentaux en quête d’opportunités ? Selon les dernières recherches de Standard Chartered, l’industrie des biens de consommation à croissance rapide dans les économies émergentes semble celle qui affiche un très grand potentiel.
Notre étude porte sur 400 banques, gestionnaires d’actifs et investisseurs, américains comme européens. Elle révèle que chez 50 % des acteurs interrogés, cette industrie des biens de consommation compte parmi les trois priorités de leur stratégie d’investissement à venir ou de développement. Comment expliquer cet engouement pour ce secteur sur les marchés les plus dynamiques ?
Un double dividende démographique
Ces marchés ont certaines caractéristiques fondamentales qui sont à la source de l’optimisme des investisseurs quant à l’avenir des entreprises du secteur de la grande consommation. Ces pays disposent d’une population très nombreuse – quelque 4,3 milliards de personnes [en anglais, NdT] – et les tendances démographiques qu’on y observe offrent des opportunités réelles pour le secteur.
Primo, la classe moyenne se développe à un rythme soutenu dans ces pays. Sur 32 marchés dynamiques dans le monde, le think tank Oxford Economics prévoit que cette strate sociale doublera quasiment de volume dans la décennie à venir, pour atteindre un total de 687 millions de ménages. Ces derniers sont de plus en plus nombreux à disposer d’un revenu leur permettant une consommation discrétionnaire [en anglais, NdT].
Secundo, les consommateurs de ces marchés ont tendance à être plus jeunes que leurs homologues occidentaux. D’après McKinsey, 75 % des premiers cités auront entre 15 et 34 ans d’ici 2030 [en anglais, NdT]. Toujours selon le cabinet de conseil, c’est là un facteur clé. En effet, les jeunes consommateurs sont souvent plus optimistes et plus enclins à dépenser pour acquérir des biens ou des produits de marques haut de gamme.
« Nous observons un double effet démographique, qui porte la demande pour toute une variété de biens de consommation, des produits du quotidien aux biens de luxe », analyse Caroline Eber-Ittel, CEO de Standard Chartered en France et Head of Client Coverage en Europe. « Nous sommes en présence d’une classe moyenne en croissance et d’un nombre de jeunes personnes qui croît également. Ces groupes sont particulièrement friands de consommation. »

* Pourcentage d’acteurs interrogés indiquant que le secteur des biens de consommation dans ces 20 principaux marchés dynamiques compte parmi leurs trois priorités d’investissement futur ou de développement commercial. Source: FT Longitude/Standard Chartered, Future powerhouses: How western financial institutions are banking on dynamic markets, 2024 [en anglais, NdT]
Pour Caroline Eber-Ittel, certains marchés sont particulièrement intéressants. La Thaïlande vit l’émergence d’une classe moyenne soucieuse de la durabilité et de la santé. Et 65 % des établissements financiers occidentaux prévoyant d’investir dans le pays du sourire citent les biens de consommation comme un secteur prioritaire. Le même constat s’applique à la Malaisie et à sa diversité ethnique (59 % des acteurs interrogés), où les entreprises peuvent déployer des stratégies marketing ayant fait leurs preuves et ciblant les minorités indiennes, chinoises ou thaï.
Cap sur un autre continent. L’Afrique du Sud est l’un des plus grands marchés de consommation d’Afrique et un précurseur dans l’adoption de l’e-commerce. 59 % des établissements financiers occidentaux voient la nation arc-en-ciel comme une terre d’opportunités. La technologie est un facteur toujours plus important dans de nombreux pays africains. Caroline Eber-Ittel explique ainsi que les populations du continent à l’aise avec le numérique aspirent à nouer des relations numériques étroites avec leurs marques préférées, notamment via l’e-commerce et les réseaux sociaux.
Une opportunité non dénuée de difficultés
Certes, les marchés dynamiques sont source d’opportunités majeures pour les entreprises de biens de consommation et leurs investisseurs, mais les perspectives économiques demeurent mitigées. Le Fonds monétaire international prévoit une croissance de 4,2 % dans les économies émergentes en 2025. De quoi faire des envieux parmi les pays occidentaux, mais une valeur timide comparée aux taux de croissance qu’ont connu ces marchés ces dernières décennies. En effet, sur ces périodes, le PIB réel accélérait à un rythme annuel compris entre 6 % et 8 % [en anglais, NdT].
Dans certains pays toutefois, l’inflation élevée et tenace grève le pouvoir d’achat des ménages. La volatilité des taux de change et celle des taux d’intérêt constituent des risques supplémentaires pour la planification des entreprises. Les perturbations de la chaîne d’approvisionnement induites par la pandémie de la Covid-19 ainsi que l’instabilité géopolitique persistante sont des entraves supplémentaires. Le second mandat de Donald Trump pourrait aggraver cette tendance, notamment si l’administration du locataire de la Maison Blanche applique de nouveaux droits de douane.
Nombreuses sont les entreprises à s’éveiller davantage à l’importance de la durabilité. C’est toutefois un aspect à double tranchant pour les multinationales, comme le souligne Caroline Eber-Ittel. Les consommateurs issus de la classe moyenne des marchés dynamiques sont jeunes, et davantage sensibles aux incidences environnementales et aux questions de santé. Autant de caractéristiques qui structurent leurs modes de consommation. « Les consommateurs privilégient les marques et produits locaux en raison de leur empreinte carbone réduite », analyse Caroline Eber-Ittel. « Par ailleurs, les entreprises sont confrontées à une pression réglementaire croissante à adopter des pratiques ESG, soutenues par des acteurs internationaux qui promeuvent des chaînes d’approvisionnement durables. »
Les entreprises de l’industrie des biens de consommation doivent tenir compte de ces tendances mondiales et régionales tout en composant avec les nuances inhérentes à chaque marché. En effet, les préférences culturelles, les canaux de distribution, les pratiques locales et le poids réglementaire peuvent varier considérablement.
La force des partenariats
À mesure que ces entreprises du secteur des biens de consommation relèvent les défis, elles auront besoin d’être accompagnées par toute une série de partenaires et parties prenantes.
Les décideurs politiques sur les marchés dynamiques, par exemple, joueront un rôle clé dans le développement du secteur. Les investissements dans les infrastructures de transport et d’énergie permettront pour leur part la circulation efficace des biens. De plus, une infrastructure numérique de pointe dopera l’e-commerce et la gestion des chaînes d’approvisionnement. « Les décideurs politiques doivent également améliorer la formation et l’apprentissage », ajoute Caroline Eber-Ittel. « Les entreprises de ces marchés pourront ainsi compter sur des travailleurs qualifiés directement sur le terrain. »
Toujours selon la CEO de Standard Chartered, les partenaires financiers des entreprises représentent un autre acteur incontournable : « Les banques ont un rôle déterminant à jouer en matière de gestion des risques. Par exemple, les stratégies de couverture peuvent permettre aux entreprises de gérer la volatilité des changes. Par ailleurs, des outils de tarification dynamique peuvent leur ouvrir des possibilités d’optimisation des coûts. »
Les entreprises du secteur des biens de consommation souhaitant se développer sur ces marchés peuvent aussi avoir besoin de services financiers sur mesure. L’accès au financement est un enjeu stratégique pour les petites et moyennes entreprises en particulier. « Nous avons la ferme intention de promouvoir l’inclusion financière afin de soutenir les petites et moyennes capitalisations », insiste Caroline Eber-Ittel. « C’est précisément sur cet aspect que nous pouvons créer de la valeur, grâce à l’étendue de notre réseau et à notre engagement en faveur de la promotion des opportunités économiques ».
Les entreprises des biens de consommation sur les marchés dynamiques connaissent une forte croissance, et c’est une formidable opportunité pour les établissements financiers. Cependant, la réussite sera tributaire de partenariats stratégiques qui apporteront à la fois le juste soutien financier et la fine compréhension des dynamiques locales. Grâce à une solide collaboration entre les entreprises, les établissements financiers et les acteurs politiques, l’industrie des biens de consommation dans les marchés dynamiques sera en excellente position pour exploiter tout son potentiel.